Patrimoine à la loupe : détails insolites dans les manuscrits médiévaux

Les copistes ou les possesseurs de manuscrits ont parfois ajouté dans les marges des petits détails personnels parfois truculents !

Nous vous proposons d’en découvrir une sélection parmi les collections de la bibliothèque municipale.

Dans une petite bible latine du 13e siècle, le manuscrit 8, on distingue plusieurs ajouts personnels. Tout d’abord, au folio 4, les armoiries du possesseur. Grâce à elles, on sait que cette bible appartenait au 15e siècle à Arnaud de la Roquette, abbé de St Hilaire du Lauquet, près de Carcassonne, de 1476 à 1530.

Au folio 107 v, un ange finement dessiné dans la marge nous montre un passage du texte. Un peu plus loin, au folio 116v, une tête de roi est dessinée entre les deux colonnes du texte.

Apparition du roi David, fol. 116 v

Ces dessins sont postérieurs à la date de réalisation de la bible, et sont d’une main de la fin du 15e, peut-être celle d’Arnaud de la Roquette lui-même ?

L’ange semble mettre en garde le lecteur en montrant un passage du Livre de Samuel où il est question d’obéissance à Dieu. La tête couronnée représente David, lorsqu’il est sacré roi d’Israël dans le Livre des Rois.

Les copistes du Moyen Âge sont parfois prolixes sur leurs conditions de travail

Les informations qui les concernent figurent généralement à la fin du manuscrit, dans ce qui est appelé le colophon. C’est le cas dans un manuscrit de la Somme de théologie de Thomas d’Aquin copié par Francesco Florio (manuscrit 214). Ce dominicain d’origine italienne, nous donne son nom, mais aussi le lieu où il a copié ce livre (Paris), et le nombre de jours pendant lesquels il y a travaillé : 100 jours, du 22 mai au 28 août 1465.

Dans le même manuscrit, on trouve une trace exceptionnelle des méthodes de travail utilisées par l’enlumineur. En effet, les 5 petits oiseaux qui ornent les bordures du manuscrit ont tous été obtenus à partir de la technique du piquetage (ou poncif) qui consiste à reporter un motif en détourant le modèle au moyen de petits trous.

150 ans plus tôt, un autre copiste nous donne son nom, et dessine autour de celui-ci un véritable monument à sa mémoire. Dans ce recueil sur l’Histoire de l’ordre des frères prêcheurs de Bernard Gui (manuscrit 488), le copiste, un certain R. (Raymond ou Robert ?) Masquerie, frère du couvent de Prouilles, explique que la copie du texte lui a demandé un « grand travail », et qu’il l’a fait à la demande de son supérieur, Bérenger de Landorre, prieur de la province de Toulouse, en 1308.

Toulouse, Bibliothèque municipale, ms 488, f. 61v., le colophon « monumental » de R. Masquerie

Enfin le copiste facétieux d’un Recueil de sermons du 14e siècle (manuscrit 336) nous adresse un clin d’œil venu du passé. Pendant son travail de copie, il n’a pas résisté à dessiner une petite tête dans un défaut du parchemin. D’autres exemples du même type ont été signalé par la British Library, mais ils restent rares. Ces détails n’étaient jusqu’à présent pas mentionnés par les catalogueurs et commencent juste à être signalés.

Petite tête dessinée par le copiste dans un trou du parchemin, fol. 150 v

Pour finir, découvrons ce que le copiste toulousain du manuscrit 38 (traité de Nicolas de Gorran sur la Bible) indique au bas du colophon du manuscrit (fol.192 r), une fois son long travail de copie terminé : « Vinum scriptori debetur demeliori« ,

Ce qui signifie :

« Qu’on donne du vin au copiste et du meilleur »

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